Portraits croisés

Jérome Orivel et Heidy Schimann, spécialistes respectivement des fourmis et des champignons, sont les chercheurs à l’origine du projet de la recherche sur la Biodiversité Négligée de Guyane. Ils ont répondu à nos questions.

Pouvez-vous vous présenter ?

Jérôme Orivel, 48 ans, directeur de recherche au CNRS et travaillant dans le laboratoire Écologie des Forêts de Guyane.

Heidy Schimann, 47 ans, chargée de recherche à INRAE basée au Laboratoire Écologie des Forêts de Guyane à Kourou. Je suis Écologue et spécialiste des Champignons, c’est à dire que j’étudie les relations entre les champignons et leur environnement.

Comment décririez-vous votre métier et pourquoi l’aimez-vous?

Jérôme : C’est un métier que l’on ne subit pas car il est plus passionnant que rébarbatif, plus varié que monotone, et il stimule la curiosité. C’est aussi un travail de groupe/d’équipe. Cela fait déjà beaucoup d’avantages qui estompent la partie moins intéressante, essentiellement administrative.

Heidy : C’est un métier que l’on choisit, passionnant et plein de surprises. C’est un travail d’équipe qui permet plein de rencontres passionnantes et de moment d’échanges toujours fructueux.

Que faites-vous en ce moment ?

Jérôme : C’est la dernière année pour le projet BiNG, il nous faut finaliser ce qui a été entamé et valoriser les résultats obtenus par des publications scientifiques. Je travaille aussi sur d’autres projets en cours, toujours autour des fourmis, et même temps je réfléchis et tente de trouver des financements pour d’autres projets futurs.

Heidy : Je valorise les résultats acquis sur différents projets en les publiant dans des articles scientifiques. J’essaye de trouver des financements pour de futurs projets.

Quel est le point commun entre les champignons et les fourmis ?

Jérôme : Photo, faite par Alain Dejean, d’une ouvrière d’Oecophylla longinoda au Cameroun capable de tenir seule un oisillon mort. [Pour l’histoire, Alain m’avait montré cette photo quand j’étais jeune étudiant et cela m’avait impressionné. Et encore maintenant !]

Jérôme : Ce sont tous les deux des groupes d’organismes importants, dans les forêts tropicales notamment. Les fourmis sont les principaux prédateurs d’autres arthropodes et les champignons font partie des principaux décomposeurs. A noter aussi les fourmis ont inventé l’agriculture bien avant l’Homme et l’exemple bien connu est la fourmi manioc qui cultive un champignon à partir de végétaux et s’en nourrit.

Heidy : Ces groupes permettent le bon fonctionnement de la forêt donc et pourtant ils souffrent d’être toujours méconnus et une grande partie de leurs espèces restent encore à décrire.

De quel aspect du projet BiNG êtes-vous le/la plus fier/e ?

Jérôme : De son ensemble car c’est un projet très équilibré. D’un point de vue scientifique, c’est un projet qui a permis d’acquérir pas mal de connaissance sur les groupes d’organismes étudiés, mais aussi qui a permis l’accès à l’emploi et la formation de plusieurs personnes et enfin avec un volet médiation scientifique et communication important auprès des jeunes et du grand public.

Heidy : Probablement le fait que BING a permis l’emploi et la formation de plusieurs personnes ; mais aussi les cahiers pédagogiques à destination des enseignants ainsi que la campagne d’affichage sur la Biodiversité Négligée.

Où dirigeriez-vous un curieux qui veut en savoir plus sur les fourmis/champignons de Guyane ?

Jérôme : Sur les fourmis en général, il y a de très bons livres sur les fourmis, notamment ceux de Luc Passera sur les fourmis qui sont en français. Pas mal de documentaires également dont certains superbes de la BBC et d’autres. Pour les plus motivés qui voudraient savoir quel est le nom des fourmis qu’ils rencontrent, il y a beaucoup de ressources sur Antwiki.org

Heidy : Pour découvrir les champignons en général de nombreux sites internet existent par exemple mycodb.fr , ou encore jlcheype.free.fr qui dédie une page aux champignons guyanais. Pour s’initier à la taxonomie des champignons de la région : Agaric Flora of the Lesser Antilles, Pegler 1983

Heidy : l’intensité du rouge de ces petits Hygrocybe m’étonne toujours !

D’autres projets en cours ou à venir ?

Jérôme : Toujours !  Notamment, le projet BUG (Biodiversité Urbaine de Guyane) qui devrait permettre d’étendre ce qui a été initié dans BiNG et de mettre en place des sciences participatives avec les écoles pour caractériser la biodiversité des villes en Guyane.

Heidy : La finalisation de BiNG avec l’analyse et la valorisation des résultats. D’autres projets se préparent en parallèle, en particulier sur les interactions entre les champignons et les plantes.

Racontez-nous une blague sur les fourmis/champignons…

Jérôme : J’en connais qu’une …. : quel est le cri de la fourmi ?  Elle cro-onde, car la fourmi cro-onde.

Heidy : « Les champignons poussent dans les endroits humides,  c’est pourquoi ils ont la forme d’un parapluie. » Philippe GELUCK


* Le projet BING « Biodiversité Négligée de Guyane : de la connaissance à la valorisation », porté par le CNRS pour l’UMR EcoFoG, est cofinancé par l’Union européenne et le CNES. L’Europe s’engage en Guyane avec le Fonds européen de développement régional.