Appelez-la « Docteur »

Quand Arielle Salmier a rencontré les responsables du Laboratoire des Interactions Virus-Hôtes (LIVH), lors d’un congrès à Paris, et qu’ils lui ont parlé d’un projet de thèse sur les virus de chauve-souris, elle était loin de s’imaginer crapahutant dans une grotte en pleine forêt. Et pourtant…

Arielle passe son bac scientifique au lycée Melkior-Garré avant de s’envoler pour la Guadeloupe tenter une première année de médecine qu’elle ne validera pas. Elle se réoriente alors en Licence biologie cellulaire et physiologie à l’Université de Limoges. « Oui, il y avait bien une licence de biologie à Cayenne, mais les spécialités proposées ne m’intéressaient pas ».

Après la licence, ce sera un Master 1, toujours à Limoges, et un premier contact en laboratoire avec le monde des virus. « C’est de là, je crois, que vient mon intérêt pour le fonctionnement des virus ! » C’est à l’issue de son stage de Master 2 en parasitologie à l’Institut Pasteur à Cayenne qu’Arielle participe à un congrès à Paris. Elle souhaite poursuivre sa formation à la recherche par une thèse ; Anne Lavergne et Vincent Lacoste, les responsables du LIVH, cherchent eux un candidat pour développer une nouvelle thématique de recherche.

Six mois plus tard, le projet de thèse est validé et financé par le LabEx CEBA[1] et la candidature d’Arielle retenue. Elle démarre en 2012 : « Je devais Identifier les virus présents et leur diversité chez deux espèces de chauve-souris ayant des habitats différents. »

Le travail se passe en partie à la paillasse au laboratoire, où elle isole le matériel génétique des échantillons puis le multiplie. La suite, l’identification, se passe au bureau devant l’ordinateur. « On travaille dans de très bonnes conditions au LIVH : le laboratoire est grand, bien équipé et on a tous un bureau avec ordinateur. Le bémol par contre est que pour remplacer un appareil en panne, il y au moins 6 mois d’attente à partir du moment où la commande est passée !  J’ai perdu presque un an en début de thèse comme ça. »

En expédition dans une grotte
En expédition dans une grotte

La collecte d’échantillons fait également partie de la formation d’un chercheur.

« On avait rendez-vous très tôt le matin au labo équipés de vêtements longs pratiques et de bottes. On a chargé filets, piquets ainsi qu’une cantine de matériel de laboratoire avant de partir en voiture. On a roulé 1h30 et encore marché 30-45 minutes en forêt pour arriver devant les grottes dans lesquelles nichent les chauves-souris. Ça a été une découverte ! Je ne savais même pas qu’il y avait des grottes en Guyane !! On a déposé la cantine et marché encore, dans l’eau, pour rentrer dans la grotte avec des filets qu’on a installés pour capturer les chauves-souris. Au sol, on avait disposé une toile cirée pour récupérer les crottes !

Pochon
Pochons contenant chacun une chauve-souris en attente de prélèvement

Une fois les chauves-souris capturées dans les filets, équipés de gants, on les décroche délicatement, les place dans des pochons individuels qu’on ramène et accroche à l’entrée de la grotte. On en a attrapé une quarantaine, qu’une à une on a sortie des pochons, identifiée, mesurée pour déterminer leur stade de développement. Puis on les a prélevées avant de les relâcher. De retour à Cayenne en début de soirée, nous avons enfin pré-traité les échantillons avant de rentrer chez nous. »

Arielle a publié ses résultats et les a présentés lors de congrès scientifiques à Cayenne, Toulouse, Paris et Fort-Collins aux USA. Elle a soutenu sa thèse en décembre 2016.

Le Dr. Arielle Salmier effectue aujourd’hui un post-doc d’un an au LIVH, où elle travaille toujours sur les virus, d’oiseaux cette fois, dans le cadre du projet BirDiV financé par les fonds européens FEDER. Elle aimerait s’expatrier de nouveau, au Canada pourquoi pas, pour acquérir une nouvelle expérience de laboratoire.-

[1] Laboratoire d’excellence centre d’étude de la biodiversité amazonienne.

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